ll n’y a que la route pour nous faire réaliser la distance entre nous; ces paysages qui n’en finissent plus de défiler, ces arbres immobiles soumis à nos émanations et ce tapis d’asphalte usé se déroulant sous nos roues. Sur la carte routière, un point de départ, un point d’arrivée. Entre les deux, la fuite en avant.
La radio déverse son flot de paroles mais je ne les entends pas. La route accapare mes pensées, les avale pour mieux les recracher. Tandis que les kilomètres s’accumulent au compteur, la distance se creuse et un retour en arrière n’est plus possible. Nous traversons les fuseaux horaires à grande vitesse mais on s’impatiente derrière; nous ne sommes pas tous sur la route pour les mêmes raisons. Me voilà qui rêve au tournant de l’Eldorado mais n’y trouve finalement que des motels "vacancy" accueillant les voyageurs fatigués ou impatients.
De chaque côté de la route, nous côtoyons tour à tour un chemin de croix et un chemin de fer; chacun sa voie. Et toujours cette pluie qui frappe à la fenêtre et le regard qui se perd dans le ciel lourd de sens.
Au loin, les éoliennes tournent sur elles-mêmes comme les aiguilles d’une montre qui compte le temps qui reste, ces distances qui se creusent.
Mais toutes ces distances finalement ne sont qu'illusoires; sitôt on s’éloigne de quelque lieu, sitôt on se rapproche d’un autre. Un big bang perpétuel.
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