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Le saule qui console

Photo du rédacteur: France DFrance D

« Mes chers amis, quand je mourrai, Plantez un saule au cimetière. J’aime son feuillage éploré ; La pâleur m’en est douce et chère, Et son ombre sera légère À la terre où je dormirai »

Alfred de Musset


Il existe un mot en japonais, « komorebi », difficilement traduisible, mais qui peut être compris comme « la lumière du soleil qui filtre à travers les arbres". Il évoque au passage ce lien profond avec la nature dans nos vies, de la nécessité de faire une pause, de prendre le temps de saisir la perfection des petits détails jugés insignifiants. Parce que tout n'existe qu'une fois.


En revoyant en photo du saule pleureur de nos enfances, ce sont des milliers de détails qui me reviennent en mémoire. Ma mère a dû se résigner à l'abattre cet automne; il avait presque le même âge que moi. Il a veillé sur la famille pendant toutes ces années. Notre père l'avait planté près de la maison et au fil des ans, son tronc s'est divisé en trois et ses branches ont formé un immense dôme sous lequel se réfugier. Récemment, il montrait des signes de faiblesse et ses branches se sont mises à se détacher avec fracas sous le poids des détails.


Le tronc a été préservé en espérant qu'au printemps des tiges renaitront. Est-il possible de survivre à un tel abattement? Je n'en sais rien. Les milliers de morceaux de son existence sont désormais éparpillés aux quatre vents et peut-être auront-ils semé à leur tour d'autres saules sous lesquels se réunir et s'épancher. Dans la culture tibétaine, un rameau de saule planté renait incontestablement. Son cycle est infini, c’est l’arbre immortel.


Le paysage sans lui est désolant; il était la constance dans nos vies. Ce saule nous a préservés des trop grandes chaleurs et nous a unis sous sa verdoyante chevelure. À ses pieds, nos parents s'y sont reposés les dimanches d'été et sa brise a effleuré leurs fronts inquiets. Au creux de son tronc, on y trouvait toute sorte d'objets laissés au passage, oubliés, puis retrouvés. Nos mains ont maintes fois touché au passage son écorce. Les oiseaux du printemps lui ont offert leurs plus beaux chants et son ombrage aura filtré les particules de lumière en milliers d'étoiles de jour. Il était grandiose dans son perpétuel recueillement et sa mélancolie.


Même si nous savons que rien ne résiste au temps, pas même les souvenirs, continuons d'accrocher nos balançoires aux branches des arbres, à y grimper pour voir l'horizon et à s'asseoir à leur pied, le temps d'un dimanche.


Hommage à tous ces arbres de nos vies.






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